Florence Cestac : une rebelle dessinatrice de gros nez
Nous avons capturé dans les tentacules du poulpe une autrice de bandes dessinées , Florence Cestac qui a su trouver sa place dans le monde de la BD.
En Mai 68, à 18 ans, elle se révoltait avec beaucoup d'autres jeunes contre la société en place…
« Mai 68, On ne se rend pas compte, mais ça a été extraordinaire. Parce qu’avant c’était tout gris. L’avenir se résumait à trouver un mari, faire des enfants, s’acheter une maison, faire un crédit… En Mai 68, on a tout envoyé chier. La famille, la religion… Tout d’un coup, le ciel bleu s’est ouvert. On avait le droit de faire ce qu’on voulait. J’habitais Rouen (Seine-Maritime), je suis partie à Paris et là, j’ai fait ce que j’ai voulu. J’ai suivi toute l’évolution : le droit à l’avortement, la pilule… J’ai participé à des manifestations. »
À l’époque, autrice de BD, ce n’était pas commun pour une femme.
« Très jeune, j’ai su que je voulais dessiner. Dessiner quoi, je ne savais pas. Mais dessiner. Mes cahiers d’école étaient constellés de dessins. Je n’écoutais pas les cours. Je n’étais pas du tout une bonne élève. Chez les bonnes sœurs, je me faisais expulser. »
Pourquoi dessiner des gros nez?
« Au départ, le gros nez, c’est un tic graphique qui annonce que ça va être une bande dessinée d’humour. J’ai été influencée par mes lectures de jeunesse ( Pépito , Popeye, Gaston Lagaffe ). C e sont des personnages qui avaient des gros nez. Alors je me suis dit : “Quitte à faire des gros nez, on va les faire très très gros.” »
Sa famille, Florence Cestac nous la raconte, sans concessions mais avec humour, dans tout ce qu’elle pouvait avoir de plus dur et de dysfonctionnel. La phrase-clé, résumant à elle seule l’ensemble de cette album, fut prononcée par son père à table : « - Si je me suis marié, c’est pour me faire servir. »
C’est dans ce cadre, avec un géniteur très autoritaire dénué de toute affection envers ses enfants que Florence Cestac a passé une partie de son enfance. Ce père-là, c’est la caricature de tout ce que représentait cette époque : bon vivant, convaincu par son travail, violent, il est celui qui a su appuyer sur les bons leviers pour mener une carrière exemplaire et assurer une situation confortable à sa famille. Dans cette mesure, l’individu considère que tout lui est dû. Il est le bourgeois parvenu, méprisant l’ouvrier et n’aspirant qu’à s’élever dans la société, toujours à prouver que l’on peut réussir.