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Blog-Serge-FREYDIER
26 octobre 2020

Les deux corps du roi des Présidents

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Ce n'est pas tous les jours que l'on peu échanger quelques mots avec un Président de la République.
En cette fin de mois d'octobre 2021 Emmanuel Macron était en déplacement dans le département pour parler de sujets économiques ( réaffirmation du souverainisme économique français avec le Plan France 2030).
Très disponible il est allé en fin de journée devant la mairie de Montbrison à la rencontre des personnes présentes.

  

macron_montbrison


C'est toujours troublant d'avoir un Président face à soi. Car c'est à la fois le statut mais aussi l'homme qui est devant nous.
Dans son livre Les Deux Corps du Roi, l’historien Ernst Kantorowicz explique que le roi – au Moyen Âge – a deux corps : un corps d’homme comme tout un chacun et un corps symbolique qui représente la nation et ne meurt jamais. Kantorowicz note que cette idée est issue de la théologie chrétienne puisque pour un chrétien, l’Église est le corps du Christ sur Terre.

Nous sommes tous susceptibles d’avoir deux corps car nous sommes tous susceptibles d’exercer des responsabilités. Notre corps responsable, notre corps engagé dans l’action est autre que notre corps habituel car il est regardé. Il est l’outil de l’action et de la responsabilité. Nous l’habillons en fonction de cette action et de cette responsabilité.
Chaque homme engagé dans l’action, comme le roi, a deux corps : son corps physique et son corps responsable. Le corps physique est nourri, soigné, entretenu, réjoui. Le corps responsable est instrumentalisé.

Macron3

On peut penser qu'Emmanuel Macron vise à concilier, sous l’habit du président, les "deux corps du Roi". En 2015 dans un entretien accordé au 1 il déclarait:
"Dans la politique française, cet absent est la figure du roi, dont je pense fondamentalement que le peuple français n'a pas voulu la mort. La Terreur a creusé un vide émotionnel, imaginaire, collectif : le roi n'est plus là ! On a essayé ensuite de réinvestir ce vide, d'y placer d'autres figures : ce sont les moments napoléonien et gaulliste, notamment. Le reste du temps, la démocratie française ne remplit pas l'espace. On le voit bien avec l'interrogation permanente sur la figure présidentielle, qui vaut depuis le départ du général de Gaulle. Après lui, la normalisation de la figure présidentielle a réinstallé un siège vide au coeur de la vie politique. Pourtant, ce qu'on attend du président de la République, c'est qu'il occupe cette fonction. Tout s'est construit sur ce malentendu." 

  On comprend donc qu'il y a une tension entre le corps statutaire et le corps physique. L'un invite à la prise de distance avec le trop humain mais l'autre est dans la chaleur du vivant. Un sacré dilemme!

Autre point marquant des bains de foule présidentiels, il sont fait d'inombrables touchés. Poignées de mains, bras touchés, bises parfois, enlacement pour les situations dramatiques....Tout cela renvoit aux "rois thaumaturges (qui font des miracles) qui guérissaient les écrouelles.

Depuis le 12e siècle environ, les rois de France ont "guéri" les écrouelles, une maladie d'origine tuberculeuse touchant les ganglions. L'infection forme d'imposants boutons purulents et violacés sur les cous des personnes atteintes, que l'on appelle "scrofuleux". Les souverains touchaient le cou du malade et faisaient un signe de croix. A partir de Louis VI, ce geste se fera surtout juste après le sacre royal, même s'il peut advenir à n'importe quel moment. Et c'est au 16e siècle que le "toucher royal" est accompagné des paroles "le roi te touche, Dieu te guérit".

Henri_4

Les rois ont abusé du geste de guérison : on sait que François Ier a touché 1.806 personnes atteintes des écrouelles en deux ans. Le recordman est Louis XIV, avec, durant l'ensemble de son long règne, 200.000 malades touchés.

Le rite royal commencera à tomber en désuétude après Louis XIV. A partir de 1739, Louis XV ne touchera plus les malades. Louis XVI reprend l'usage en 1775. Forcément, la Révolution interrompt la tradition reprise tout de même pour le sacre de Charles X en 1825. Il touchera 121 malades et en "guérira" cinq.

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